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«Je ne veux pas gagner ma vie, je l'ai.» (Boris Vian)

Mon fauteuil est nerveux. Ni black, ni femme, ni arabe, ni homosexuel, je fais partie d’une minorité de six millions de personnes partout invisibles, les handicapés. Paraplégique maladif, ces quelques mots parlent de mes maux…

J’ai de la chance, je travaille. Sinon, le montant de l'Allocation de Compensation du Handicap est fixé à un MAXIMUM de 711.95€  (696,63 € en 2010, le seuil de pauvreté en France est de 910 €). Un handicapé est donc un pauvre, (sauf s’il est riche, mdr).

Minorité à peine connue, le handicapé supporte également les discriminations ordinaires de la vie publique. Il se doit donc de rester invisible…

Mais, voilà, mon fauteuil a une irrésistible envie de parler, et il ne mâche pas tous ses mots….

Le fauteuil en courroux
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TÉmoignage

La diversité biologique de notre planète est d'une richesse inouïe. Son histoire évolutive est d'abord liée à la variation que la sexualité (la méiose) entraîne, c'est pourquoi je parle de biodiversité amoureuse. En étudiant cette sexualité invraisemblable des organismes vivants, nous découvrons combien elle est à la source de l'aventure évolutive. La biodiversité est le résultat de la sexualité, les espèces nouvelles émergent de ce que les individus ne se séduisent plus (les espèces naissent des amours contrariés) et les espèces se maintiennent de ce que les individus se reconnaissent et s'aiment encore (une espèce est un groupe de populations interfécondes). Nous nous éloignons donc de la conception typologique (l'espèce est traditionnellement considérée à partir d'un holotype, une description dans un muséum à laquelle les autres membres sont rapportée) pour entrer dans une conception dynamique où l'espèce se constitue provisoirement dans un continuum associant toute les espèces, comme un groupe temporaire capable d'amour (de se reconnaître et d'avoir des relations sexuelles).

Dans l'incroyable variété des formes de sexualités pratiquées dans la nature, les sexualités humaines ne constituent en rien une exception. Chaque espèce n'est pas un ensemble irrémédiablement isolé des autres, c'est juste une affaire provisoire de désir sexuel et de rapports intimes. L'évolution a privilégié la diversité des conduites sexuelles et il n'existe pas de normes. En analysant les comportements animaux et les échanges génétiques qu'organise le sexe, nous pouvons de mieux en mieux comprendre les fondements biologiques de la  « nature » humaine. Ainsi, le conflit sexuel ne se résume pas à un slogan féministe, mais correspond à une réalité biologique de l'évolution des sexes, dont la compréhension peut favoriser l'émergence de rapports nouveaux entre hommes et femmes.

Est-ce que la survenue de votre handicap vous a affecté dans vos travaux, vos ambitions ou d'une autre manière ?
Mon handicap est survenu en quelques mois à la suite d'une maladie. Cela a largement freiné mes recherches et il fallut convaincre pour obtenir quelques maigres aménagements de mes lieux de travail. Cela a également affecté mon évolution de carrière. Certains collègues ont même lorgné sur mon remplacement et évoqué ma retraite. La science est un milieu de concurrence qui favorise les amertumes. Mais j'ai toujours été marginal dans mon approche du travail à l'université et si j'ai gardé une grande naïveté sur le milieu scientifique, c'est que la science reste le lieu de toutes les curiosités et des découvertes de l'incroyable diversité du monde.

Vous êtes très militant et avez la parole libre. L'avez-vous toujours été ou l'êtes-vous devenu avec le temps ou peut-être la survenue de votre handicap? En d'autre termes, est-ce que le handicap qui vous a pris de la mobilité vous a aussi libéré la parole?
On ne peut être chercheur sans considérer que la curiosité et la liberté de penser sont des qualités essentielles à déployer. Je ne suis pas seul à penser cela, Poincaré, par exemple disait dans "Dernières pensées" «  La liberté est pour la science comme l'air pour l'animal ». La liberté doit s'inscrire comme un devoir scientifique pour réduire les idéologies marchandes et eugénistes qui encombrent la science et bornent le raisonnement. En outre, on peut être un biologiste rigoureux, être antifasciste et se révolter contre les multiples injustices de ce vieux monde. Mais, vous avez raison, je crois que le handicap a accru ma liberté de ton, favorisant davantage encore la perception de l'iniquité et de l'arbitraire.

Pour vos recherches, j'imagine que vous devez beaucoup vous déplacer. Comment cela se passe-t-il avec votre handicap?
Difficilement bien sûr, même en ville ce monde est mieux organisé pour la voiture que pour le fauteuil roulant. Il est temps de changer cela et développer la liberté d'accéder à tous les lieux publics, aux logements, aux transports comme un droit fondamental, universel, dans un principe de non-discrimination. Toutes les personnes y gagneront en accessibilité.
Sur le terrain, je dois substituer aux observations scientifiques, des méthodes indirectes, non-invasives, études des traces, des gènes et autres travaux vidéo. Il n'empêche que je ne pourrais pas réaliser cela sans l'aide bénévole d'assistants et que je me consacre davantage à la biologie théorique.

Comment analysez-vous l'intégration des personnes handicapées? Selon vous, quelles en sont les lacunes ou les points forts, les manquements, les réussites ou les échecs?
Notre société marchande est un échec considérable qui rejette et exclut les plus pauvres, les plus démunis au nom de la compétition et de l?enrichissement de certains. Accumuler des biens et des objets est un drôle de but de vie et le système ne repose que sur l?exploitation des autres. Le bonheur des humains devrait constituer le projet principal de la vie sociale. Le principe central de ce monde est l?exclusion à travers la concurrence. Depuis l?école jusqu?à la retraite, la discrimination est encouragée. Le développement de la vie associative résistante, la prise de parole, la solidarité entre discriminés, la désobéissance qu?osent de plus en plus les gens constituent cependant le meilleur signe d?une évolution sociale.

Peut-on trouver un équivalent dans les sociétés animales de la position sociale des personnes handicapées? - Pensez-vous ou avez-vous jamais approfondi ce parallélisme pour analyser le rôle social joué par les personnes handicapées au travers de ce prisme?
La vie sauvage est brutale, mais elle n'est pas aussi cruelle que les humains l'imaginent et souvent moins barbare que les sociétés humaines l'ont été. Certains animaux handicapés (après une collision ou ayant perdu un membre dans un piège) survivent dans la nature. Leur plus grande vulnérabilité est compensée par une incroyable volonté de vivre et parfois par une aide indirecte de leurs congénères. J'ai découvert ainsi un putois paralysé des pattes arrières et qui a vécu seul plusieurs mois avant d'être victime d'un piège. Les espèces plus sociales, comme les singes ou les dauphins, peuvent comporter des individus qui s'associent ou atténuent les difficultés des plus faibles. On a vu par exemple des éléphants soutenir des éléphanteaux handicapés ou accompagner des animaux malades. Il faudrait ajouter aux deux principes de sélection naturelle et de sélection sexuelle, le rôle de l'association et de la coopération dans la nature. En fait, l'évolution biologique privilégie la différence, la variation plus que la concurrence. C'est toujours à partir d'une différence, d'un handicap, d'une atrophie que se séduisent les êtres vivants et que l'évolution biologique se construit.

La sexualité

Le sexe reste encore l’un des tabous les plus fermés du handicap.
Mais c’est aussi que le vieux monde s’avère l’un des plus répressifs sur la sexualité. Au point de préférer le silence plutôt que de savoir qu’il n’offre que l’ombre de ses caves ou de recoins vulgaires aux jeunes qui découvrent les émois de leur corps.

Rassurez-vous, bien des handicapé(e)s connaissent une sensibilité (et une rigidité performante) subtile et agréable dans leurs amours. Mais ces forces individuelles ne doivent pas cacher combien le vieux monde préfère la dissimulation coupable et la misère sexuelle en pesant de tout son poids sur les amours adolescentes et plus mures. Dans sa prétention d’organisation, l’état se mêle bien davantage de sexualité et de répression que d’autre chose. La révolution des amours constitue la plus belle réponse aux refoulements et la sexualité libre entre adultes consentants reste plus que jamais la revendication d’une humanité véritable….

Loin de s'avérer une relation facile, l'amour est aussi fait de nos difficultés et de nos états d’âme, mais c'est ici qu'il faut travailler dans nos têtes et nos corps à toujours plus refuser l'exclusion, combattre la ségrégation des sentiments. Si on peut comprendre la lutte de chacun contre le fascisme des têtes et le nazisme corporel, il n’y a pas d'autre, aucun autre qui ne soit aimable au seul regard de son corps.

La Biodiversité Amoureuse

Décidément, les canards abusent. Alors que la plupart des oiseaux ne possèdent pas d’organes sexuels, l’érismature ornée est un canard qui dispose d’un phallus de plus de 40cm. Quant au nez surdimensionné du nasique ou aux rayures du tigre, il faut bien que cela serve à quelque chose !

Les façons de l’évolution se sont développées à travers un érotisme sauvage, depuis les toutes premières bulles libertines jusqu’au parfum des visons et au chant des baleines.

La Biodiversité amoureuse

Or, une invraisemblable lacune parcourt la théorie évolutive : le sexe a été oublié. En fait, le Darwin actuel a été réinventé par le Néodarwinisme. Ainsi se sont affirmées et la génétique et la primauté des plus forts.

Mais savez-vous que les biologistes n’avaient pas vu un éléphant ? Et si l’évolution n’était pas la course des meilleurs ? Si les gènes n’expliquaient pas tout le périple des corps ? Si les animaux et les humains avaient partagé leurs stratégies d’amour ? En introduisant la sexualité au cœur des interactions évolutives, il est possible de dévoiler que, si le sexe ne sert à rien, c’est qu’il est le sujet d’une autre histoire.Plus même, car la leçon des siphonophores montre que l’évolution des organes s’est édifiée comme un emboîtement de poupées russes.

Saisissant avec truculence la vie intime des espèces, ce livre revisite la contribution scientifique des différents protagonistes du néodarwinisme jusqu’aux travaux scientifiques les plus récents.
Alors, la biodiversité se découvre amoureuse.

La Biodiversité Amoureuse
Le Sexe et L'Évolution
Éditions Odile Jacob, 2011

Cours de Génétique des Populations

"L'évolution, c'est le hasard trié par la mort" affirmait Cuénot. Les organismes vivants tirent leur diversité de la variation aléatoire des gènes mais ne peuvent propager leurs caractères que par une contribution différente de chaque individu à la reproduction. Sous les contraintes de l'environnement, les populations divergent inéluctablement, inscrivant dans leurs différences l'émergence irréversible des espèces nouvelles.
Cours de génétique des populations

La génétique des populations étudie la transformation génétique des populations et se dote des moyens de quantifier les divergences et d'évaluer la signification adaptative des changements. En s'appuyant sur des études de cas précises, ce cours constitue une approche synthétique des principaux fondements de la génétique des populations et s'ouvre sur les perspectives contemporaines de la biologie évolutive.

Cours de Génétique des Populations
Éditions Ellipses, 1998

La Guerre des Sexes chez les Animaux

L'orchidée Ophrys est une fleur sournoise. Son aspect contrefait la femelle d'un bourdon Osmia avec tant de perfection, avec tant d'ingéniosité que le bourdon connaît un irrépressible désir de déflorer la fleur. L'orchidée use d'un curieux stratagème pour se reproduire: la perfide invite les bourdons au sexe par ses couleurs et ses formes, et complète même sa supercherie en émettant les parfums de l'amour des bourdons.
La Guerre des Sexes chez les Animaux
La co-évolution de la fleur et de l'insecte relève de l'influence contradictoire du sexe et des contraintes naturelles et complique singulièrement la compréhension de la mécanique évolutive. En outre, chez les bourdons, les mâles ne sont pas vraiment des mâles. Et quand bien même, comme chez les phasmes, les femelles peuvent s'en passer. L'un ou l'autre sexe n'y trouve guère son compte, et la sexualité de la fleur s'immisce dans la crise sexuelle des bourdons, dans la bataille entre les bourdons mâles et femelles.

Quoi ? Le sexe ne composerait pas un événement harmonieux? L'épisode de la sexualité constitue l'un des principaux fondements de l'évolution biologique, probablement l'un des plus fascinants aussi. En introduisant une différence initiale entre deux sexes, l'aventure de la sexualité a profondément modifié le monde, et engagé une guerre, le conflit des sexes.
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«En étudiant les petits carnivores (putois et visons), j'ai constaté que certains préféraient l'« amour courtois », tandis que d'autres témoignaient de relations sexuelles différentes (inversions de dominance, homosexualité…). Donc, au sein d'une même espèce, on trouvait : une grande variété de conduites sexuelles, des rapports conflictuels entre mâles et femelles et, entre ces deux genres (normalement faits pour coopérer dans la reproduction), des évolutions contradictoires ou antagonistes au sein desquelles la reproduction pouvait néanmoins avoir lieu. Autrement dit : un jeu de « chacun pour soi » dont la dynamique construit un équilibre (précaire). Là est la nouveauté. Chez les drosophiles, par exemple, les mâles produisent un sperme toxique afin de détruire celui d'un éventuel prédécesseur. Le lieu du conflit sexuel est donc le corps de la femelle qui, affectée par la toxicité de ce sperme, peut en mourir. Par conséquent, les femelles qui ne copulent pas avec les mâles les plus toxiques vont mieux se reproduire. C'est l'existence de ces relations contradictoires qui perturbe radicalement les théories néodarwiniennes.»

«C'est cela que l'on appelle, depuis la découverte du biologiste américain William Rice 1 à la fin des années quatre-vingt-dix, la « coévolution antagoniste ». Cela introduit, en effet, une véritable controverse dans le domaine de la biologie évolutive, parce que le conflit entre les êtres vivants va promouvoir beaucoup plus de variations que s'il n'y avait pas de conflit. Ce qui va au-delà de l'opposition entre neutralistes (les espèces se forment à partir de gènes qui dérivent au hasard) et adaptationnistes (les pressions de l'habitat sont essentielles), puisque, ici, on découvre que c'est le conflit qui crée la dynamique adaptative. Les groupes d'insectes où le conflit sexuel est le plus intense sont aussi ceux qui produisent le plus fort taux de formation de nouvelles espèces. Et ce mécanisme est non seulement possible, mais il est courant !»

«On a pensé pendant longtemps que la sélection sexuelle favorisait la reproduction des animaux dotés des meilleurs gènes. Aujourd'hui, on découvre qu'il n'y a pas de normes : l'évolution privilégie la variation des comportements sexuels. Ceux qui réussissent ne sont pas les meilleurs, ce sont les plus fanfarons, les plus opportunistes et parfois les plus violents. De plus, toutes les conduites sexuelles sont essentielles pour la biodiversité. Ainsi, les agames (espèces de lézards), ont deux phénotypes 2 reproducteurs. Le phénotype tardif résiste mieux à l'hiver mais est sensible à l'aridité estivale ; le phénotype précoce supporte bien les étés secs mais reste vulnérable au froid hivernal. Parce qu'il y a naturellement une alternance des hivers froids et des étés arides, les deux phénotypes reproducteurs sont importants pour la survie de l'espèce. Si l'un des deux venait à disparaître, on arriverait à un moment donné où, soit un hiver rigoureux, soit un été caniculaire finiraient par entraîner la disparition du reste de la population. La leçon est claire : il n'y a pas de meilleurs gènes en soi. Beaucoup de recherches sont encore à mener, beaucoup d'espèces à documenter. Il faut encourager les jeunes chercheurs à creuser dans cette voie : elle ouvre de prometteuses perspectives.»

(source)

La guerre des sexes chez les animaux
Éditions Odile Jacob, 2007
Compte-rendu de La guerre des sexes chez les animaux par Jean Lassègue

Les Stratégies de Reproduction des Animaux

Cet ouvrage magnifiquement illustré fait la synthèse, dans une perspective évolutive, des comportements reproductifs des animaux. En partant d'une description détaillée des modalités très différentes de la reproduction selon les espèces, l'auteur met en évidence la logique de ces processus en termes d'avantages sélectifs et de mécanisme évolutif.
Les stratégies de reproduction des animaux
Éditions Dunod, 2001
Les stratégies de reproduction des animaux

L'Apparition de l'Humanité

Un des documents les plus récents sur l'apparition de l'humanité
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